Le cinéaste suédois Ruben Östlund signe
un film bouleversant, oscillant entre drame et comédie sarcastique. Une
exploration des relations hommes-femmes sous un tout nouveau jour, dans un
décor aussi angoissant que libérateur.
La force du film réside dans une
maîtrise parfaite de son rythme, et de l’évolution des personnages dans les
lieux de l’intrigue. Tomas et Ebba emmènent leurs deux enfants, Vera et Harry,
cinq jours dans les Alpes pour faire du ski. Un séjour qui tourne au cauchemar,
lorsqu’une avalanche envahit la terrasse du restaurant où la famille est en train
de déjeuner. Face à ce danger, Tomas fuit, laissant sa femme et ses enfants
seuls. Plus de peur que de mal, car tout le monde s’en sort, mais un silence s’installe
dans le couple, et perturbe les enfants.
Le film explore les différentes phases
par lesquelles passent Tomas et Ebba suite à ce drame. Du silence total à la
crise d’hystérie nocturne, les deux personnages ne se reconnaissent plus, et
tentent coute que coute de se rassurer. C’est en réalité de ça que traite le
film : la recherche d’une protection à travers l’amour. Ebba doute de la
capacité de Tomas à la protéger, et développe des questionnements autour de ce
besoin, dans le couple traditionnel monogame. De son côté, Tomas doute de sa
virilité, et de sa capacité à agir en tant qu’"homme". A travers ces deux
personnages, le film questionne la dualité du couple : femme et mère de
famille, homme et père de famille. Deux grandes questions autour des
représentations du masculin et du féminin, qui sont ici subtilement mises en
scène.
Les lieux du film et le choix des
cadrages jouent un rôle déterminant dans l’évolution de l’état des personnages.
Le film ne voue pas un culte au plan d’ensemble d’introduction, et reste
longtemps très proche de ses personnages, en privilégiant des plans serrés qui
ne les intègre pas dans un espace reconnaissable. Les scènes dans l’appartement
sont longtemps limitées à des prises dans la chambre, où les 4 membres de la
famille dorment sur le lit. Cet étouffement du cadre est symbolique du huis
clos familiale dans lequel le spectateur est plongé (et qui n’est pas sans
rappeler celui de Shining, qui se
passe également dans un hôtel à la montagne), cela à la limite d’une représentation
incestueuse. L’intimité du couple (et individuellement d’Ebba et Tomas) est d’ailleurs
mise à l’épreuve tout au long du film, si bien qu’on ne peut pas se représenter
réellement leur relation. Ils sont envahis, à la fois de manière littéral par cette
avalanche, mais également par leur rôle de parents qui semble les empêcher d’exister
en tant que couple. Ebba fait la connaissance d’une femme dans l’hôtel qui
prend des vacances loin de ses enfants et de son mari, et dont la liberté de mœurs
qu’elle adopte bouleverse Ebba vis-à-vis de sa propre condition. Ce couple est
dans une telle crise qu’il la propage chez les autres, du couple d’amis aux
passagers d’un bus.
Le film avançant, la caméra recule,
offrant un espace de réflexion aux personnages, mais également une vision d’ensemble
au spectateur. Le huis clos se démêle lentement, laissant place aux dialogues,
aux rires, aux larmes et aux cris. Snow
Therapy est unique dans cette maniabilité des genres, ce jeu des espaces,
et le talent bouleversant dont font preuve les acteurs. Un film à voir absolument,
car il pose des questions qui nous concernent tous, à travers une narration
surprenante.
Snow Therapy, réalisé par Ruben Östlund, actuellement en salle !
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