jeudi 25 décembre 2014

Gaby Baby Doll

                               

                 Gaby (Lolita Chammah) est terriblement angoissée à l’idée de passer ses nuits seules. Son angoisse est si grande qu’elle est prête à passer la nuit avec n’importe qui, tant qu’on lui tient compagnie. Son médecin lui recommande de prendre l’air à la campagne, et lui prête sa maison, où elle se rend avec des amis. Mais au bout de quelques jours, lassés de devoir garder Gaby, ils s’en vont, la laissant seule face à elle-même. Elle rencontre alors Nicolas, un solitaire vivant dans une cabane.

Dans la même veine que ces deux précédents films (La Vie au ranch et Les Coquillettes), Sophie Letourneur développe une histoire simple, à l’esthétique naturelle (beaucoup de plans fixes), à travers un langage authentique et insolite, qui donne au film toute sa force. Gaby Baby Doll traite de la solitude par deux motifs significatifs de ce thème : le rien, et la répétition. C’est grâce à une narration lente et réaliste – rendue crédible par l’environnement dans lequel évoluent les personnages : la campagne – que les symptômes de l’angoisse de Gaby sont le mieux représentés. Et cette lenteur narrative permet de développer le « rien » de l’action, un peu à l’image des films de la Nouvelle Vague. On retrouve d’ailleurs une connexion entre les films de Sophie Letourneur et ceux de la période Nouvelle Vague, à travers cette grande liberté narrative et langagière. Ce « rien » de l’action donne donc lieu à de nombreuses répétitions narratives et esthétiques, qui une fois encore viennent appuyer le désir du film d’explorer le vide, le silence, la solitude.

On peut féliciter la réalisatrice, qui réussit à traiter ce thème avec une grande justesse et beaucoup d’humour, en mettant en scène les symptômes de Gaby qui, à l’image d’une Bridget Jones, gagne la sympathie du spectateur grâce à son excentricité. Ce troisième film marque encore plus concrètement le style de la cinéaste, qui semble toujours préférer envoyer ses personnages dans un lieu de parenthèse (la colocation, le festival, le séjour à la campagne) pour exprimer les maux du quotidien. Plus ils fuient le réel, plus ils sont rattrapés par lui. On retrouve également un traitement très particulier de la féminité, car Gaby se balade sans culotte, court dans la boue en talon, garde son vernis écaillé, et pisse devant les autres, si possible dehors. Ce positionnement sur la féminité, volontaire ou non, donne au film toute sa fraîcheur et son grain de folie. On en redemande ! 

                                             

Gaby Baby Doll, réalisé par Sophie Letourneur, actuellement en salle ! 

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