Gaby (Lolita Chammah) est terriblement angoissée à l’idée
de passer ses nuits seules. Son angoisse est si grande qu’elle est prête à
passer la nuit avec n’importe qui, tant qu’on lui tient compagnie. Son médecin
lui recommande de prendre l’air à la campagne, et lui prête sa maison, où elle
se rend avec des amis. Mais au bout de quelques jours, lassés de devoir garder
Gaby, ils s’en vont, la laissant seule face à elle-même. Elle rencontre alors
Nicolas, un solitaire vivant dans une cabane.
Dans la même veine que ces deux
précédents films (La Vie au ranch et Les Coquillettes), Sophie Letourneur
développe une histoire simple, à l’esthétique naturelle (beaucoup de plans
fixes), à travers un langage authentique et insolite, qui donne au film
toute sa force. Gaby Baby Doll traite
de la solitude par deux motifs significatifs de ce thème : le rien, et la
répétition. C’est grâce à une narration lente et réaliste – rendue crédible par
l’environnement dans lequel évoluent les personnages : la campagne – que
les symptômes de l’angoisse de Gaby sont le mieux représentés. Et cette lenteur
narrative permet de développer le « rien » de l’action, un peu à l’image
des films de la Nouvelle Vague. On retrouve d’ailleurs une connexion entre les
films de Sophie Letourneur et ceux de la période Nouvelle Vague, à travers
cette grande liberté narrative et langagière. Ce « rien » de l’action
donne donc lieu à de nombreuses répétitions narratives et esthétiques, qui une
fois encore viennent appuyer le désir du film d’explorer le vide, le silence,
la solitude.
On
peut féliciter la réalisatrice, qui réussit à traiter ce thème avec une grande
justesse et beaucoup d’humour, en mettant en scène les symptômes de Gaby qui, à
l’image d’une Bridget Jones, gagne la sympathie du spectateur grâce à son
excentricité. Ce troisième film marque encore plus concrètement le style de la
cinéaste, qui semble toujours préférer envoyer ses personnages dans un lieu de
parenthèse (la colocation, le festival, le séjour à la campagne) pour exprimer
les maux du quotidien. Plus ils fuient le réel, plus ils sont rattrapés par
lui. On retrouve également un traitement très particulier de la féminité, car
Gaby se balade sans culotte, court dans la boue en talon, garde son vernis écaillé, et pisse devant les
autres, si possible dehors. Ce positionnement sur la féminité, volontaire ou
non, donne au film toute sa fraîcheur et son grain de folie. On en redemande !
Gaby Baby Doll, réalisé par Sophie Letourneur, actuellement en salle !
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